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Santé mentale des salariés fragilisée : la Daf très exposée

Publié par Florian Langlois le | Mis à jour le

Après près de deux ans de crise sanitaire et au moment où la reprise est plus que jamais espérée, le moral des salariés français n'a jamais été aussi bas. Un constat d'autant plus marquant pour la fonction Finance où 58% des Daf étaient en situation de détresse psychologique fin 2021.

Les scénarios concernant la reprise économique ne semblent pour l'instant que peu optimistes. L'organisation internationale du travail (OIT) estime "qu'un retour aux performances d'avant la pandémie risque de rester hors de portée pour une grande partie du monde au cours des prochaines années". En France, l'INSEE table également sur un léger ralentissement de la croissance au premier trimestre 2022, en raison de la 5ème vague que nous traversons actuellement. Dans ce contexte compliqué, les salariés français semblent plus épuisés que jamais pour aborder cette nouvelle année 2022.

15% des salariés en France montrent des signes d'un état dépressif et 23% d'un état anxieux selon une étude de Santé Publique France réalisée sur le dernier trimestre 2021. Mais la tendance est encore plus importante au sein de l'équipe finance et notamment chez les Daf eux-mêmes : 58% des Daf étaient en situation de détresse psychologique en fin d'année dernière, dont 23% en situation de détresse psychologique élevée (risque de développer des troubles anxio-dépressifs ou des burnout) selon le psychologue du travail et président du cabinet Empreinte Humaine, Christophe Nguyen.

Les Daf sont également la population qui présente le plus grand risque de dépression, à hauteur de 39%, 4 points au dessus des autres populations non-manager.

Un rôle très exposé

Un chiffre qui s'explique par leur rôle central et très exposé au sein d'une entreprise. "Les Daf ont généralement des personnalités très exigeantes voire perfectionnistes. Cette période d'incertitude, de surcharge et de changement les a particulièrement exposés. Leurs profils a dû les amener à se surinvestir davantage. Le télétravail et la digitalisation ont également énormément bousculé leur mode de fonctionnement" indique le psychologue.

Le Daf s'est aussi souvent retrouvé isolé au sein de son entreprise, provoquant en partie cette surcharge de travail. "Lorsque cette surcharge est prolongée, elle amène à un épuisement, qu'on a pu facilement constater" poursuit Christophe Nguyen. Or il est impératif que le Daf se préserve pour évoluer sereinement. "Les Daf ont une fonction centrale et stratégique. Ce qui est important, c'est de ne pas juste faire preuve d'abnégation et de se sacrifier pour les autres parce qu'on pense que c'est notre devoir. Il faut savoir se protéger pour ne pas s'écrouler et savoir être attentif à ses signaux personnels" rapporte le psychologue.

L'une des autres causes de cette dégradation de la santé mentale est le recours au télétravail. Selon la FIRPS (la Fédération des Intervenants des Risques PsychoSociaux), le télétravail a été la cause d'addictions comportementales. Il a fait ressortir des problématiques d'hyper connexion (augmentation de plus de 50% du temps d'écran, principalement chez les cadres en télétravail) ou certaines pratiques addictives, notamment chez les personnes les plus fragiles.

Les entreprises peuvent agir

La crise sanitaire a tout de même permis à bon nombre d'entreprises de prendre conscience de l'impact de ces risques. Cependant, pour Christophe Nguyen, des mesures restent à prendre pour continuer d'améliorer la prise en compte des risques psychosociaux encore négligés par trop de dirigeants. Il est par exemple nécessaire de développer un climat de sécurité psychologique au sein même de ces sociétés. "Il faut faire de la prévention des risques psychosociaux un vrai sujet d'entreprise et prendre en compte que la santé et le bien être psychologique des salariés sont source de performance durable." Pour ce faire, le président du cabinet Empreinte Humaine conseille de travailler dans des conditions de travail stimulantes tout en étant reconnu et soutenu dans son quotidien. "Une autre solution est de sonder ses salariés. Cela permettra aux collaborateurs d'exprimer leurs difficultés et la façon dont ils vivent leur travail."

De son côté, la FIRPS recommande de mettre en place des dispositifs de vigilance des collaborateurs en difficulté et/ou des dispositifs de soutien psychologique. Cela passe par la formation des managers comme acteurs de la prévention, la formation du personnel de santé et des managers à la détection et à l'orientation des personnes concernées par des pratiques addictives et la mise à disposition de lignes d'écoute, de conseil et d'accompagnement psychologiques, qui permettent un accès immédiat 24h/24, 7J/7 à des psychologues.