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Faute de l'employeur : le salarié doit désormais prouver le préjudice subi

Publié par Eve Mennesson le | Mis à jour le

Pierre Safar, avocat en droit du travail (Dupuy et Associés), nous éclaire sur une récente décision de la Cour de cassation. Laquelle impose désormais de prouver le lien de causalité entre une infraction au Code du travail par une entreprise et le préjudice subi par le salarié.

Quel était l'état de droit avant cette décision?

Auparavant, la Cour de cassation décidait que lorsque l'entreprise enfreignait une règle du Code du travail, cela causait de manière nécessaire un préjudice au salarié. Il s'agissait d'une règle très spécifique au droit du travail. En effet, en droit civil " classique ", une indemnisation suppose normalement la réunion de trois composantes : une faute, un préjudice et un lien de causalité entre les deux. En droit du travail, une faute suffisait à entrainer une indemnisation, sans que le salarié ait à démontrer un préjudice et un lien de causalité. Par exemple, si une entreprise oubliait de convoquer un salarié à une visite médicale, l'indemnisation était automatique, même si le salarié ne souhaitait pas s'y rendre. Ce qui pouvait aggraver le dossier d'une entreprise face à un salarié lors d'un procès.


Et que change cette décision ?

La cour de cassation a opéré un revirement significatif. Elle revient selon moi à une plus grande orthodoxie juridique : la dérogation dont bénéficiait le Code du travail est supprimée (pour consulter la décision Cass. soc. 30 juin 2016, n° 15-16066). Désormais, si une entreprise déroge à ce code, cela n'entraine pas de manière nécessaire une indemnisation. Il appartient au salarié de prouver un préjudice et un lien de causalité. Les exemples potentiels d'application de cette nouvelle règle paraissent vastes : temps de travail ou obligations de délivrance de certains documents.


Ce nouvel arrêt marque-t-il le début d'une jurisprudence favorable aux entreprises ?

Je ne pense pas que nous pouvons parler d'une tendance. L'application de cette nouvelle jurisprudence va d'ailleurs certainement prendre du temps à s'installer car les anciennes pratiques sont depuis longtemps présentes dans les esprits. L'importance de la faute de l'entreprise aura sans doute son importance dans l'appréciation des juges, de même que les preuves apportées par le salarié. Mais on peut espérer que ce nouvel arrêt rentrera petit à petit dans les moeurs.


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